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From	wash <wash@ecn.org>
Date	Tue, 29 Feb 2000 18:55:05 +0100
Subject	globe_l: [Fwd: Serbie: Belgrade saisie par la paranoÔa (IWPR), 22 -2-2000*]

-------- Original Message --------
Objet: Serbie: Belgrade saisie par la paranoÔa (IWPR), 22 -2-2000*
Date: Fri, 25 Feb 2000 10:53:36 +0100
De: "cecile.fisler - Le Courrier des Balkans" <CECILE.FISLER@wanadoo.fr>
RÈpondre-A: "cecile.fisler - Le Courrier des Balkans"
<CECILE.FISLER@wanadoo.fr>
A: <balkans@cru.fr>

The Institute for War & Peace Reporting
Rapport sur la crise des Balkans Nƒ 118
22 fÈvrier 2000
(traduit par CÈcile Fisler)

BELGRADE SAISIE PAR LA PARANOIA.

Les habitants de Belgrade sont au bord díune dÈpression nerveuse
collective,
alors que les pressions dues au fait de vivre dans un Etat paria font
des
ravages.

Par Gordana Igric (rÈdacteur en chef associÈ du Rapport sur la crise des
Balkans. Elle síest rÈcemment rendue ý Belgrade).

Miodrag V. (40 ans), pËre de trois enfants, vivant ý Belgrade, se
rÈveille
la nuit avec le cúur qui bat et dans des draps trempÈs de sueur.

´Je veux míenfuir, mais cíest inutileª, dit-il. ´Je ne peux plus faire
la
diffÈrence entre les rÍves et la rÈalitȪ.

Depuis la fin en juin des bombardements de Belgrade par líOrganisation
du
traitÈ de líAtlantique nord (OTAN), les Serbes vivent dans la terreur
díune
guerre civile et díune nouvelles vague de frappes aÈriennes de líOTAN.
Leur
paranoÔa a ÈtÈ aggravÈe par la menace de nouveaux conflits, de
líisolement
international et de la pauvretÈ.

Vera B. vient de toucher son salaire de 32 deutschemarks, qui ne lui
avait
pas ÈtÈ payÈ depuis avril de líannÈe derniËre. Elle demande ý un ami :
´As-tu entendu dire quíils vont de nouveau nous bombarder dans un mois?
Je
prÈfËre mourir que díentendre encore une fois les sirËnes díalerte
aÈrienneª.

Cíest líatmosphËre de dÈsespoir qui rËgne en Serbie. Ni líOTAN, ni le
rÈgime
serbe níont laissÈ percer  aucune indication selon laquelle de nouvelles
hostilitÈs pourraient Ítre imminentes, mais les gens restent convaincus
que
´quelque chose se trameª et que leur sort est dÈjý scellÈ.

Pourquoi líOTAN voudrait-elle bombarder la Serbie? Les thÈories de
conspiration vont bon train. Certains disent que les AmÈricains ont
dÈcouvert au Kosovo des nappes de pÈtrole qui sont les plus importantes
du
monde et que ce serait la raison pour laquelle la Serbie tient ý garder
le
territoire. Díautres affirment que les puissances occidentales cherchent
dÈsespÈrÈment ý síassurer une route vers les puits de pÈtrole de la
Caspienne et que la Serbie leur bloque le passage. Díautres enfin
pensent
que le monde prÈfËre les Albanais.

Un technicien dentaire  hoche la tÍte líair soucieux : ´Ne voyez-vous
pas ce
quíils nous font ý cause des  ´Shiptarsª (nom pÈjoratif donnÈ aux
Albanais)?ª, demande-t-il.

MÍme ceux qui excluent les thÈories de conspiration pensent que les
bombardiers vont revenir ý Belgrade. Ils pensent que Slobodan Milosevic
va
dÈclencher des combats au MontÈnÈgro, son proche voisin et simple
associÈ
dans la FÈdÈration yougoslave ñ afin díÈviter une guerre civile en
Serbie et
son propre effondrement politique.

Il est possible que le Kosovo soit une fois de plus le champ de
bataille,
mais le rÈsultat sera le mÍme. Cette fois líOTAN rasera complËtement
Belgrade.

Les sceptiques disent que les rumeurs sont rÈpandues dÈlibÈrÈment par
les
indicateurs de la police qui agissent sur ordre du rÈgime de Belgrade.
´Vous
ne pouvez faire peur ý un enfant quíavec un gourdinª, dit líun díeux.
´Et
dans ce cas, le gourdin est un bombardement de líOTAN. Cíest la faÁon la
plus facile pour le rÈgime de se cramponner au pouvoirª.

Finalement, il y a la peur inexprimÈe que les Serbes seront punis par
Dieu
pour tous les crimes quíils ont commis contre les autres groupes
ethniques
de líex Yougoslavie.

Etant donnÈ que les derniers bombardements de líOTAN níont pas rÈussi ý
provoquer la chute de Milosevic, la population est dÈchirÈe entre deux
Èmotions contradictoires ñ peur de líOccident et colËre contre le
rÈgime.

Les opposants politiques du prÈsident sont Ègalement inquiets au sujet
de lí
avenir. Depuis la tentative díassassinat contre le chef du Mouvement du
Renouveau serbe, Vuk Draskovic, les leaders de líopposition síentourent
dí
escouades de protection qui auraient fait envie ý un gangster de Chicago
des
annÈes 30. Lorsquíils sortent des limousines blindÈes, les gardes du
corps
sautent dans la rue avec des armes et ils sont prÍts ý tirer.

La mÍme paranoÔa devient Ègalement Èvidente dans les rangs du parti au
pouvoir. Dans la derniËre ligne droite avant le congrËs du parti
Socialiste
de Serbie (SPS) de la semaine derniËre, pendant lequel Milosevic a
consolidÈ
sa position, les experts de líÈlimination des bombes ont inspectÈ chaque
centimËtre du Centre Sava en prÈvision díune tentative díassassinat.

Le jour du congrËs, les partisans du lobby estudiantin Otpor
(´RÈsistanceª)
ont ÈtÈ arrÍtÈs pour avoir apposÈ des affiches ý líextÈrieur du Centre
et
´parce quíils prÈsentaient une menace pour la sÈcuritȪ. La nouvelle
Belgrade a ÈtÈ immÈdiatement bouclÈe et son accËs limitÈ aux cars
díouvriers
serbes troublÈs, amenÈs lý depuis la campagne environnante.

Le discours de Milosevic au congrËs a ÈtÈ suivi par une standing ovation
de
20minutes. Un retraitÈ qui attendait son tour chez le dentiste et
regardait
líÈvÈnement ý la tÈlÈvision, a marmonnÈ furieusement : ´Jíaimerais bien
que
ce soit son dernier discours ñ comme pour Ceaucescu!ª, en faisant
rÈfÈrence
ý la mort du prÈsident roumain en dÈcembre 1989.

Un chauffeur de taxi qui a servi dans plusieurs guerres menÈes par
Milosevic
au nom de la ´Grande Serbieª a montrÈ du doigt un grand panneau
díaffichage
annonÁant le congrËs du SPS.  Agrippant furieusement son volant, il a
dÈclarÈ que le temps Ètait venu ´díÈliminer les voleurs et les traÓtres
du
Kosovoª.

Le vice-Premier ministre ultra-nationaliste, Vojislav Seselj, fait
construire un mur de quatre mËtres de haut autour de sa maison ý
Batajnica,
note avec jubilation un de ses voisins. Le voisin vit Ègalement dans une
peur constante, mais il jubile devant ce signe de faiblesse.

On pense gÈnÈralement que les menaces rÈcentes de Seselj de liquider les
journalistes indÈpendants et les ´placeniksª (´agents des puissances
ÈtrangËresª) ont ÈtÈ  inspirÈes par la panique, et tous ceux qui ont eu
la
chance de voir son visage ý la tÈlÈvision la semaine derniËre affirment
quí
il Ètait envahi de terreur.

Une jeune femme membre du parti JUL, dirigÈ par la femme de Milosevic,
refuse de rÈpondre lorsque quelquíun sonne ý sa porte. Il y a un
interphone
dans son immeuble, mais elle níouvre sa porte quíaux visiteurs qui lí
appellent sur leur tÈlÈphone portable depuis la rue et quíelle connaÓt
personnellement.

Il y a des preuves de plus en plus nombreuses que Milosevic est
confrontÈ ý
ses propres dÈmons. Il vit avec sa femme dans un isolement quasi-total
et
prend des dÈcisions sans consulter son cabinet. Cependant, lui seul peut
transmuer sa peur en violence.

Ressentant une haine passionnÈe envers tous ceux qui en Serbie refusent
de
partager son point de vue, Milosevic dans son discours au congrËs a
montrÈ l
íÈtendue de sa paranoÔa.

Milosevic a dÈclarÈ que tous les dissidents Ètaient des l’ches, des
terroristes, des spÈculateurs et des voleurs, prÍts ý rÈpandre le sang
serbe
pour plaire ý leurs riches patrons occidentaux.

Il semble probable que cette panique grandissante va inciter le rÈgime ý
dÈclarer un Ètat díurgence. Les autoritÈs menacent dÈjý de b’illonner
les
mÈdia indÈpendants: dÈclarer líopposition illÈgale pourrait Ítre la
prochaine Ètape.

Le message de Milosevic au congrËs a ÈtÈ sans Èquivoque : ´des idÈes
diffÈrentes au sujet de líEtat et de líordre social, qui Èloignent les
partis líun de líautre, devraient attendre des jours plus pacifiquesª.

Mais cela fait trËs longtemps que la Serbie nía pas connu de journÈes
pacifiques.





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