From
|
"Diffuseur" <diffuseur@altern.org>
|
Date
|
Thu, 10 Aug 2000 14:40:07 +0200
|
Subject
|
globe_l: Le tÈlÈflicage version belge
|
Article paru dans le Matin du 3 Aošt 2000, plus d'infos
sur le site du SÈnat (www.senate.be puis
actualitÈs, dossiers, Projet de loi relative ý la criminalitÈ
informatique)
Le tÈlÈflicage version belge
Alors que l'Angleterre et la Russie installent des
mouchards sur les rÈseaux, la Belgique devrait leur emboÓter le pas ý la
rentrÈe
La semaine derniËre, l'Angleterre a
adoptÈeune loi autorisant des procÈdures d'Ècoutes policiËres sur les rÈseaux
informatiques. Une loi, inquiÈtante ý bien des Ègards, adoptÈe bien
discrËtement...
DiscrÈtion, une mÈthode qui prÈvaut
Ègalement en Belgique o˜ une loi semblable devrait voir le jour ý la rentrÈe.
Soumis et acceptÈ ý la chambre, le projet de loi belge est passÈ avec succËs au
sÈnat pour un retour devant les dÈputÈs en septembre. TrËs vraisemblablement
pour une adoption sans histoires. Et ce malgrÈ des avis extrÍmement nÈgatifs
Èmis par le conseil d'Etat et la commision de protection de la vie
privÈe...
"Ce projet de loi dÈfinit de
nouvelles formes d'infractions, explique Yves Poullet, professeur aux
facultÈs universitaires de Namur, directeur du centre de recherche informatique
et droit. Mais, surtout il modifie des rËgles de la procÈdure pÈnale pour
permettre ý la police d'obtenir plus facilement des
informations."
Tout d'abord, la loi propose une
modifications des procÈdures d'Ècoutes. DorÈnavant, les opÈrateurs de
tÈlÈcommunications seront tenus de collaborer avec les autoritÈs judiciaires
pour permettre ý ces derniËres de disposer d'informations en termes
comprÈhensibles (dÈdigitalisÈes et dÈcryptÈes) sous peine de sanctions.
"C'est dÈjý trËs inquiÈtant parceque le terme "opÈrateur" inclut beaucoup de
choses, explique le professeur. Par exemple, il peut s'appliquer ý une
autoritÈ de certification de signature ÈlÈctronique. On peut aisÈment imaginer
tous les abus auxquels cette loi peut conduire."
Mais un autre aspect de la loiest plus
inquiÈtant encore. Un article oblige ainsi tout opÈrateur ý conserver pendant 12
mois toutes les donnÈes d'identification de l'utilisateur. Ces donnÈes seront
dÈfinies par arrÍtÈ royal. "Cet article est extrÍmement dangereux,
poursuit le professeur Poullet. Tout d'abord, les donnÈes d'identification
ne sont pas dÈfinies dans la loi elle-mÍme, ce qui est illÈgal au regard de la
convention europÈenne des droits de l'homme qui prÈcise que toute intrusion dans
la vie privÈe doit faire l'objet d'une loi prÈcise, motivÈe et nÈcessaire au
regard d'un objectif prÈcis. Or la loi belge est totalement imprÈcise... Les
donÈes d'identification peuvent inclure, par exemple, la liste de tous les sites
consultÈs, la liste de tous les amils avec leurs contenus... Une fois
ces fichiers constituÈs, rien ne dit qu'ils ne seront pas utilisÈs ý d'autres
fins (profilage de la clientËle), notamment de la part des opÈrateurs. Sans
compter que la durÈe couverte par ce fichier est tout ý fait disproportionnÈe.
La commission europÈenne elle-mÍme avait dit qu'elle ne devait pas excÈder 3
mois. Mais le plus grave, c'est qu'une collaboration entre le secteur privÈ et
le judiciaire est tout ý fait contraire ý l'idÈe mÍme de la procÈdure pÈnale. Il
n'y a mÍme pas bessoin de preuves pour agir. On agit ý
priori."
Mais ce texte ne semble pas Èmouvoir
grand monde au sein de la classe politique belge, si on en juge par le
nombre et le sens des amendements proposÈs. On notera aussi le faible Ècho donnÈ
aux avis du conseil d'Ètat et de la commision de la vie privÈe. "C'est une suite
de l'affaire Dutroux conclut le professeur Poullet. On adopte une politique
sÈcuritaire et la crainte permet de justifier n'importe quoi. Y compris des
mesures totalement disproportionnÈes..."
BenoÓt Gilson.