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Date
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Wed, 29 Sep 1999 13:18:01 +0200
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Subject
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globe_l: No Pasaran - Quel avenir pour les balkans ?
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BALKANS : QUEL AVENIR ?
Trois mois et demi aprËs la fin de l¹intervention militaire de l¹OTAN
contre la RÈpublique fÈdÈrative de Yougoslavie, la situation dans les
Balkans est toujours aussi mauvaise et elle prÈfigure peut-Ítre une
situation gÈnÈralisÈe dans de nombreux endroits de la planËte.
Le rÈgime de Milosevic n¹est pas tombÈ et semble avoir encore de beaux
jours devant lui. Ce politicien utilise toujours les mÍmes ficelles pour
maintenir son pouvoir.
o Maintien ou crÈation de situation qui les mettent lui et le peuple serbe
en situation de victime. C¹est le cas dans le Nord du Kosovo o˜ les
paramilitaires dÈstabilisent dÈlibÈrÈment les tentatives de sÈcurisation.
C¹est le cas aussi au MontÈnÈgro o˜ les fidËles de Milosevic organisent des
rÈunions tribales et menacent de crÈer des rÈgions auto-administrÈes. Cette
situation rappelle ce qui s¹est passÈ au dÈbut des annÈes 90 en Bosnie-
HerzÈgovine ou en Croatie et qui s¹est terminÈ par la guerre civile.
o Division de l¹opposition en crÈant des partis d¹opposition bidon.
L¹opposition s¹est largement dÈconsidÈrÈe. Elle n¹est pas capable de
proposer un programme civil qui tranche avec le passÈ. Elle reste toujours
nationaliste, ne s¹appuie pas rÈellement sur la sociÈtÈ civile. De nombreux
dirigeants ont souvent ÈtÈ mÍlÈs au pouvoir de Milosevic et leur pouvoir
est souvent dš ý la corruption.
Milosevic a de fortes chances de remporter les Èlections du printemps 2000,
il pourrait former un gouvernement qui se donnerait une image dÈmocratique,
rÈformatrice en s¹alliant avec des partis de l¹opposition, (pourquoi pas le
Mouvement serbe du renouveau (SPO) de Vuk Draskovic), et en Ècartant les
fascistes de Sesselj. Dans ce cas, les gouvernements occidentaux, dont le
discours est d¹inciter le peuple serbe ý virer Milosevic, ne seraient-ils
pas satisfaits d¹une telle situation ? Elle permettrait de lÈgitimer les
liens avec la Serbie, de lever les sanctions, Š Foin des droits de l¹homme,
des libertÈs, de la dÈmocratie !
Le chaos du Kosovo
Pour Bernard Kouchner, il Ètait sans doute plus facile et mÈdiatique de
porter des sacs de riz en Somalie que d¹administrer le Kosovo sous tutelle
de l¹ONU.
La rÈgion est sinistrÈe Èconomiquement, il faut s¹attendre, tout comme en
Serbie d¹ailleurs, ý des pÈnuries importantes de nourriture, de logements,
Š pour l¹hiver. Pour l¹instant, les secteurs Èconomiques qui sont relancÈs
sont plus liÈs ý la prÈsence des militaires de la KFOR, des ONG, avec
toutes les consÈquences que l¹on sait : dÈpendance, dÈveloppement de la
corruption, de la mafia, Š. Le plan de stabilitÈ signÈ par les puissances
occidentales ý Sarajevo le 31 juillet, outre que les promesses seront loin
d¹Ítre tenues comme d¹habitude, n¹a-t-il pas pour but premier au mieux de
se transformer en instrument de colonisation Èconomique des Balkans et
pour le moins de se donner bonne conscience.
Cependant, de mÍme qu¹en Bosnie, les investissements Ètrangers ne sont pas
massifs, car la sÈcuritÈ et la stabilitÈ sont loin d¹Ítre assurÈes ni dans
l¹immÈdiat, ni pour l¹avenir.
Une donnÈe nouvelle est que dÈsormais au Kosovo, les Albanais ne veulent
plus vivre avec les Serbes.
Les dÈcouvertes de charniers, les disparus, les prisonniers 1, les
logements dÈtruits ont mis ý mal les relations entre les Serbes et les
Albanais pour plusieurs gÈnÈrations.
La moitiÈ des serbes et une grande partie des roms auraient quittÈ le
Kosovo. Les rÈfugiÈs serbes sont trËs mal accueillis en Serbie et sont
laissÈs ý eux-mÍmes, s¹ils n¹ont pas de familles pour les accueillir. Quant
aux roms, pris sans cesse entre deux feux, ils sont rejetÈs par les Serbes
et les Albanais.
Au Kosovo la protection des non albanais consiste en la prÈsence constante
de la KFOR et de la police internationale lý o˜ les non-albanais vivent
actuellement, ou dans les lieux o˜ les communautÈs ethniques menacÈes
devraient retourner.
Quel avenir ?
Il est ý craindre que ce qui se passe en Bosnie-HerzÈgovine se reproduise
au Kosovo.
Les accords de Dayton avaient comme objectifs affichÈs la crÈation d¹une
sociÈtÈ multi-ethnique, multi-culturelle en crÈant deux Ètats (un Ètat
serbe : la rÈpublique Srpska, et un Ètat croato-bosniaque) chapeautÈs par
un Ètat fÈdÈral. Dans les faits, l¹Ètat fÈdÈral ne fonctionne pas, et trois
entitÈs se sont crÈÈes : un Ètat Croate, un Ètat Bosniaque et un Ètat
Serbe. Les administrations de chaque Ètat font traÓner les retours des
rÈfugiÈs ; les programmes scolaires ne sont pas unifiÈs ; les hommes
politiques sont intÈressÈs uniquement par leur maintien au pouvoir et sont
de plus en plus corrompus. Les scandales ý rÈpÈtition Èbranlent un peu plus
la fÈdÈration de Bosnie-HerzÈgovine. Ils confirment l¹impression de
criminalisation gÈnÈrale de la sociÈtÈ et de corruption des autoritÈs.
Les extraits de l¹entretien donnÈ au Courrier des Balkans par Zivanovic 2
dÈcrivent bien la situation.
"Š Le problËme principal, c¹est que nos politiciens n¹ont pas de
programmes, d¹idÈes, de projets, et cela a un effet nÈgatif. La politique
dans sa totalitÈ n¹est qu¹un brutal jeu de pouvoir. La consÈquence logique,
c¹est que les partis politiques ont peur de leurs identitÈs. Il n¹y a pas
de diffÈrences entre les sociaux-dÈmocrates indÈpendants, les Socialistes
et les Radicaux. La politique est rÈduite au calcul des moyens d¹obtenir
51% des voix, par exemple au parlement, et de prendre le pouvoir. Il est
logique que n¹importe qui s¹unisse avec n¹importe qui, Partisans et
Tchetniks, policiers et criminels, etc.. Cette caractÈristique n¹est pas
propre ý la Republika Srpska, on retrouve la mÍme chose dans la FÈdÈration.
Il existe d¹autres problËmes. L¹un a trait ý notre structure mentale
particuliËre. Cette structure mentale s¹est dÈveloppÈe au cours d¹une
longue pÈriode de quinze ans, elle a rÈduit nos vies autour du facteur
majeur de la nationalitÈ. Dans la rue, je ne rencontre plus des Ítres
humains, mais des Serbes, des Croates, des Bosniaques. Les gens ne votent
pas pour des individus ou des membres de partis politiques, mais pour des
membres de nationalitÈs. A cause de cela notre Etat ne peut pas
fonctionner. Prenons par exemple la demande d¹une police multinationale,
que le Haut reprÈsentant des Nations unies, soutient tout particuliËrement.
Il n¹y a pas de police de l¹Ètat, il y a les polices des nationalitÈs.
Cette structure mentale ne nous mËnera nulle part sinon ý d¹autres
destructions. On peut aussi citer d¹autres problËmes, comme les systËmes
d¹Èducation, les diffÈrenciations de langages, etc.
Tous ces exemples montrent ý quel point notre vie peut Ítre divisÈe sur un
espace gÈographique si petit, ý quel point nous n¹avons aucune perspective.
Je crois aussi que, mÍme si nous nous levions avec force contre les
obstacles mis au retour des rÈfugiÈs et dÈplacÈs, nous aurions ý faire face
ý un problËme plus grave encore : la jeune gÈnÈration et les personnes
qualifiÈes quittent le pays, notre sociÈtÈ est maintenant une sociÈtÈ
vieille."
Dans cette pÈriode de turbulences, les seules perspectives offertes par les
occidentaux se rÈsument au marchÈ unique, au libre Èchange patronnÈ par le
FMI, l¹OMC, Š les problËmes sociaux sont rÈsolus par le diffÈrentialisme,
l¹apartheid social.
Dans ce cadre, la question de l¹identitÈ devient primordiale, une rÈponse
qui se traduit par la volontÈ de crÈer des Ètats purs ethniquement avec
toute la sauvagerie qui l¹accompagne. Faibles Èconomiquement, ou affaiblis
volontairement, les Ètats qui en rÈsultent s¹engluent rapidement dans la
corruption, les traitements inÈgaux ý l¹Ègard des minoritÈs, sources de
conflits ý l¹intÈrieur du pays ou avec les pays voisins.
Cette problÈmatique semble se gÈnÈraliser un peu partout sur la planËte :
dans les ex pays de l¹Est et plus particuliËrement dans le Caucase ; en
Asie, la Chine, L¹Inde, le Pakistan, l¹IndonÈsie sont touchÈs ; aprËs le
Kosovo, le Cachemire, le Timor fait la une des mÈdias, et demain ? Bien sšr
quasiment toute l¹Afrique est concernÈe par le mÍme phÈnomËne.
A l¹inverse de la pÈriode prÈcÈdente, o˜ le socialisme et le communisme
prÈsentaient une alternative au capitalisme, il n¹y a pas aujourd¹hui
d¹alternatives susceptibles d¹influer sur le cours des choses. Une chose
est sšre, les interventions des occidentaux dont les logiques sont soumises
au capitalisme, ý la soumission au marchÈ, au FMI, ý l¹OMC ou d¹autres
instances internationales ne font qu¹aggraver les choses.
Georges, Nantes, le 23/9/99
(1) Le ComitÈ international de la Croix-Rouge (CICR) a localisÈ 2.000
dÈtenus albanais dans des prisons en Serbie. Plusieurs milliers d¹autres
Albanais sont portÈs disparus. Ces 2.000 personnes se trouvaient pour
certaines dÈjý emprisonnÈes en Serbie avant le dÈbut de la guerre, d¹autres
ont ÈtÈ transfÈrÈes pendant les bombardements, d¹autres encore aprËs les
accords de Kumanovo qui ont mis fin aux frappes de l¹OTAN sur la RÈpublique
fÈdÈrale de Yougoslavie le 10 juin.
(2) Docteur en philosophie, un des promoteurs du pluralisme dÈjý dans
l¹ancienne Bosnie-HerzÈgovine socialiste, Zivanovic est aujourd¹hui
prÈsident du Conseil des ministres alternatif de B&H, plus connu sous le
nom de Gouvernement fantÙme de B&H - Il est l¹un des dirigeants du Parti
social-libÈral.
(3) Paru dans "Le Courrier des Balkans" le 21/09/1999
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Article ý paraÓtre dans "No Pasaran !", numÈro 70, octobre 1999
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