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From | "contracorriente" <vallseca@arrakis.es> |
Date | Sat, 25 Mar 2000 09:39:24 +0100 |
Subject | globe_l: IRAK ENCORE |
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Irak : Bavures occidentales
Jean-Pierre Sylvestre
Le Mouton Noir
La terre ne tourne pas toujours rond. Ce qui se passe actuellement en Irak
n'a vraiment plus de sens. Je reviens d'un deuxième séjour au cours duquel
j'ai visité Bassora, haut lieu mythique du sud de l'Irak. Après maintes
tentatives, nous avons réussi à obtenir un permis de séjour d'une journée
dans cette ville où se trouvent l'île de Simbad le marin et le pommier d'Adam
et Ève, si cher à notre culture judéo-chrétienne. Bassora, traversée par des
canaux et bordée par de sublimes maisons de briques finement travaillées et
aux volets de bois, est connue comme « la Venise de l'Orient ».
Mais Bassora a été durement touchée par un déluge de bombes iraniennes durant
les huit ans de conflit au cours des années 80, par les agressions «
chirurgicales » alliées de la guerre du Golfe de 1991, puis encore par les
actions éclatantes anglo-américaines de janvier 1999. Mais la tragédie que
subit la deuxième plus grande ville irakienne ne s'arrête pas là : chaque
jour, des avions anglais et américains continuent de jeter leurs lots de
roquettes dans le sud du pays - et aussi dans le nord.
La démarche pour se rendre dans le sud de l'Irak fut donc difficile. Une
semaine auparavant, deux journalistes suédois en reportage à Ur (à 150 km au
nord-ouest de Bassora) avaient été grièvement blessés par un tir de roquettes
provenant d'un avion de chasse américain. Quelques jours plus tard, un autre
journaliste, égyptien (du Caire) celui-là, a assisté d'assez près à une
attaque aérienne étatsunienne dans la même région !
Seules les personnes présentes dans cette région peuvent constater l'ampleur
des dégâts et la bêtise des frappes. Bassora se trouve à six heures de route
de Bagdad. Nous avons facilement franchi un grand nombre de barrages. Après
quatre heures de route, notre véhicule arrive dans la ville d'Amara où nous
apprenons que les forces aériennes américaines et peut-être britanniques ont
mis le paquet pour bombarder un centre de communication situé en pleine ville.
Nous repartons vers la « zone de conflit » qui, officiellement, n'en est pas
une puisque aucun journal occidental ne parle des raids aériens que subit
toujours le peuple irakien. Presque à chaque kilomètre, nous apercevons des
petites casernes qui ressemblent plus à des camps de colonies de vacances
qu'à de redoutables camps militaires. Nous en tirons une conclusion : la
plupart des sites stratégiques supposément craints par le Pentagone ne
semblent pas mériter le millième du missile qui leur est destiné.
Subissons-nous un lavage de cerveau par la propagande étatsunienne ? Pourquoi
bombarder un peuple déjà soumis à un embargo depuis bientôt dix ans ? Que
fait l'ONU contre la destruction systématique d'un peuple, d'une civilisation
et d'un patrimoine ? Pourquoi l'ONU soutient-elle les USA alors que ce pays
ne lui paie plus ses cotisations depuis plusieurs années ?
Arrivés à Bassora, nous rencontrons à l'hôtel un membre d'un organisme
français de secours humanitaire qui nous apprend la pire des découvertes : il
est mis en preuve que, pour la première fois, les forces étatsuniennes et
britanniques ont utilisé une arme atomique classée au rang des armes
conventionnelles. Cette nouvelle, lourde de signification, nous est confirmée
plus tard par des médecins et des scientifiques occidentaux, tous interviewés
à Bagdad. Les retombées de ces utilisations dépassent les frontières
irakiennes, elles sont présentes aux États-Unis d'Amérique !
Jusqu'en 1993, les Irakiens ignoraient que l'armée américaine avaient fait
usage de bombes radioactives sur leur territoire. Des médecins irakiens l'ont
appris en lisant des rapports et des articles publiés dans des journaux
occidentaux qui révélaient que beaucoup de soldats américains avaient de
sérieux problèmes de santé causés par l'uranium appauvri (UA) utilisé au
cours de la guerre du Golfe. Ces médecins firent le lien avec les maladies,
peu communes avant la guerre, dont souffraient de nombreux soldats et civils
irakiens. L'UA est un sous-produit hautement toxique et volatil issu du
processus employé pour obtenir de la matière de fission pour les réacteurs et
les armes nucléaires. Cette matière a une demi-vie radioactive de 4,5
milliards d'années et demeure d'une haute toxicité chimique tout au long de
son processus de décomposition. Au cours d'une enquête à laquelle
participèrent des chercheurs irakiens et occidentaux, des carcasses de
blindés radioactives et des zones complètement contaminées par l'UA furent
découvertes dans le sud de l'Irak, au Koweït et en Arabie Saoudite.
Selon certains rapports du Pentagone, les chars et les avions américains
auraient tiré au Koweït, en Arabie Saoudite et en Irak plus de neuf cent
quarante mille missiles et projectiles, ce qui représente près de cent
quarante-cinq mille tonnes d'uranium appauvri. Les scientifiques britanniques
de l'Atomic Energy Authority estiment qu'une telle quantité d'UA serait
théoriquement suffisante pour empoisonner chaque homme, femme et enfant aux
Etats-Unis au moins cent fois ! Le bilan est donc très lourd. Plusieurs
milliers d'Irakiens, civils et militaires, souffrent d'infections, de
leucémies et de cancers qui seraient dus à cette contamination. On remarque
des naissances d'enfants difformes dans le sud du pays. Tout l'environnement
irakien, air, sol eau, est touché par l'UA.
Du côté américain, le bilan est également impressionnant. Sur les sept cent
mille militaires américains envoyés au cours de la guerre du Golfe, près de
deux cent trente-cinq mille seraient affectés par l'usage de l'UA d'une façon
ou d'une autre : maux et douleurs musculaires, troubles de la mémoire, de la
parole, ulcères, troubles intestinaux et de la vessie, troubles nerveux,
cancers, problèmes cardiaques,homicides, suicides... Vétérans et
scientifiques commencent à se manifester aux États-Unis pour obtenir des
explications. Aux uns, le Pentagone fait comprendre, à grands renforts de
«secret militaire» ou de «raison d'État», qu'il vaut mieux se taire. Les
autres se retrouvent vite au chômage. Mais vu le nombre de victimes qui ne
cesse d'augmenter, aussi bien au Moyen-Orient qu'en Amérique, on ne pourra
plus longtemps faire le silence sur une pollution radioactive et une
contamination de la population qui touchent deux -- voire trois -- continents.
Ces derniers temps, les forces étatsuniennes ont continué à utiliser ces
armes radioactives dans d'autres conflits, notamment au Kosovo. Et une
certaine quantité de ces missiles sont entreposés aux États-Unis, tout près
de chez nous !
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